20 avril 2008

Rattrapage ...et paradoxe

Interview ce matin sur Europe d'une jeune instit qui organise ces fameux " cours de rattrapage" pour élèves en difficulté  tous les matins sur son  temps de vacances... pour 360 euros. 

Elle déclare tout d'abord qu'elle ne fait pas ça pour l'argent. Voire. Si on ne lui donnait rien, viendrait-elle sur son temps de vacances gratuitement " pour la beauté du geste? " Re-voire...

Ensuite, la démonstration en direct de ce qu'on dit depuis toujours : prendre un petit groupe d'élèves  - ici, il s'agit d'un groupe de 6 - qui ont le même type de difficulté ( on appelle ça un groupe de besoin (s) - et les faire bosser loin du grand groupe classe dans des activités décalées, ça peut être payant et surtout ça peut leur permettre de remonter dans le train des apprentissages. J'ai pas dit : des apprentis sages ... quoique ...

La solution est donc évidente : au lieu de payer des pédagos pendant les vacances - et de chauffer toute une école pour quelques élèves - bonjour l'économie et l'écologie ! - pourquoi ne pas organiser ces cours de rattrapage en petits groupes TOUTE L'ANNEE ? 

Comment ? En ayant un enseignant surnuméraire par groupe scolaire qui prendrait ces élèves en charge. On peut même imaginer un roulement dans le cadre d'un projet d'équipe : les enseignants du primaire savent très bien faire ça. Associé aux PPRE ( Projets Personnels de Réussite de l'Elève ) ça pourrait permettre à pas mal de gamins de s'en sortir. 

Il y a aussi, tiens tiens, les RASED - chargés d'aider plus spécifiquement les élèves en difficulté : c'est d'ailleurs leur boulot, à ces personnels-là formés exprès pour ! Le point d'exclamation ici s'impose car ce dispositif, pourtant très efficace, voit ses moyens réduits d'année en année, alors qu'il travaille étroitement avec les équipes d'écoles et les parents. 

Donc, moins de moyens pour les RASED, alors que les besoins n'ont jamais été aussi criants ! 

Mais ça... on vous dira alors très officiellement que ce n'est pas un problème de moyens. Alors que, justement, la mise en place de ces fameux " cours de rattrapage" apportent la preuve du contraire. Mais il est vrai que dans la fameuse "logique " du " travailler plus pour gagner plus", il est plus simple de filer 360 euros à un pédago que de créer des postes supplémentaires. 

Une fois de plus, on a du bricolage pour un problème très sérieux et qui mériterait sûrement plus que ces minables bidouillage basés sur le volontariat ...et l'appât d'un - faible - gain. 

Tout ceci est bien pitoyable. Le pire est qu'on prend, une fois de plus, l'opinion publique à témoin : " Ce cher Darcos propose des méthodes innovantes voire iconoclastes - travailler pendant les vacances. Heureusement qu'il y a a encore des enseignants assez courageux et dévoués pour prendre sur leur temps de vacances. Eux , au moins, ils travaillent ..." 

Je sais pas où on va mais on y va bien !!!

12 avril 2008

Back to 1923 ( et reprise du blog en sommeil )


Alors voilà, il paraît qu'il y en a qui critiquent ces nouveaux programmes sortis comme un lapin du grand chapeau de notre cher et si dévoué et compétent ministre Xavier Darcos-toujours-tu m'intéresses ?

Moi qui suis un ardent et zélé défenseur de l'Ordre et de la Discipline, ça me va tout à fait. Moi qui suis un nostalgique à tout crin - craint ? - des années 20, je trouve merveilleuse et touchante l'idée d'aller piocher dans les programmes et instructions de 1923 pour rétablir, enfin, la Morale au milieu de cet océan de débauches et de dépravations qu'est devenue l'Education Nationale. 

Ah ! ces leçon de morale d'antan. La phrase du jour écrite en belles lettres cursives, pleins et déliés, sur le tableau noir : " Ton père et ta mère honoreras" " Ne faites point à autrui ce que vous ne voudriez point qu'on vous fît " et puis aussi, pourquoi pas " Tu chériras ta patrie et la porteras toujours dans ton coeur". 

Il est vrai que je me sens pour le coup un peu ... dépravé, voire parfois...licencieux. Car, je l'avoue ici, et le confesse presque, je pratique assidûment des moments-philo avec mes élèves de 8 ans. Les sujets sont choisis par eux-mêmes. Ainsi, cette année nous avons eu : " A quoi sert la politique ? " " Est-ce qu'on a le droit de se moquer des autres ? " " Est-ce qu'on peut tout dire ? " Les adultes ont-ils toujours raison? " " Doit-on tout le temps écouter ses parents ? "

Chacun expose son point de vue. Je note scrupuleusement sur mon bloc toutes les propositions. Puis je les relis très précisément. Chacun peut ensuite réagir aux premières propositions. Les échanges sont parfois vifs, toujours corrects et surtout très enrichissants. Là aussi, je note tout. Le lendemain, je donne à chacun un compte-rendu écrit du débat. Certains en reparlent chez eux, d'autres non. 

Pas de phrases type, peu de contraintes. Seul le cadre est très strict pour favoriser au maximum la parole et l'échange. Personne ne dit qui a raison ou qui a tort, ce qu'il faut penser ou ne pas penser. A chacun sa vérité, son point de vue. Je suis juste là pour cadrer, éviter les débordements, recentrer sur le sujet du jour, rappeler parfois les règles. Mais, dans l'ensemble, et au fil des mois, tous se respectent et s'écoutent. Et font cela avec le plus grand sérieux. 

Je vois bien par là que nous ne sommes pas tout à fait dans le cadre des "leçons de morale" dans lesquelles la pensée était cadrée, orientée, alignée, officielle, unique, avec "peu" de possibilités de penser autre chose que ce qui était imposé. 

Aïe aïe aïe ... S'il y a un de ces jours - ce qui ne saurait tarder au TGV où vont les choses - un Ministère de la Morale et de la Pensée Unique, je crains bien ne pas être tout à fait... dans les clous. 

Je ferais bien : 
* soit de commencer à créer un comité de soutien. Mais bon...
* soit de me replonger dans les manuels de 1923 pour y piquer des phrases-types et les écrire sur mon tableau vert. 
* soit d'arrêter tout net ces moments un tantinet subversifs de parole libre. 
* soit de me faire reformater mon pauvre cerveau disque dur qui" beugue" un peu parfois. 

Et méditer cette sentence : " Ton ministre tu écouteras et ses instructions à la lettre tu appliqueras."

Rompez !