28 octobre 2006

Exagérément optimiste


Dans ce genre de boulot, et de surcroît là où je suis, il faut être exagérément optimiste. C’est ce que dit aussi Toni Morrrison, la romancière américaine dernière prix Nobel de littérature.
Loin de là l’idée, même minime, de me comparer à elle.
Elle a raison. Et comme elle est prix Nobel, ce quelle dit doit être pris en compte.

Optimiste, qu’est-ce que ça veut dire ? Et pourquoi faudrait-il l’être ? Et exagérément, en plus !

Parce que d’abord, t’as pas le choix. Ou tu y crois ou tu te tires en courant. Je suis resté, et tous les collègues aussi. C’est donc qu’on pense qu’il est possible de faire quelque chose et que ce que l’on fait sert à quelque chose. A moins que notre raison ne se soit altérée au fil du temps et des épreuves. C’est aussi une hypothèse recevable.

Vous aurez compris que je préfère et choisis le premier terme de l’alternative.

Deuzio parce qu’en termes d’éducation et d’instruction, il faut toujours croire au meilleur pour que le bon survienne. Si tu pars désabusé, battu d’avance, autant t’asseoir par terre ou choisir un autre job.

Tu sèmes de petites graines de salades. Et, même si tu n’as pas trop la main verte, il y a de grandes chances pour que ça sorte et que ça grandisse. Si tu arroses tant soit peu, tu pourras même en mettre dans ton saladier.

Avec les gamins, c’est pas tout à fait pareil. Tu laboures, plus ou moins profond, tu sèmes et des fois la récolte est bien maigre. Ou il n’y a pas de récolte du tout. Tout au moins, dans l’immédiat. Tu peux même re-semer.

En fait, t’es pas spécialement là pour voir tout de suite les fruits ou la récolte. T’es juste ensemenceur.

Dans tous les cas, il faut une conviction en acier trempé. Et même plus si possible. Il faut croire que tout est possible, même chez le plus mauvais. Avec des grands mots, principe d’éducabilité, ça s’appelle.

Et ne tordez pas le nez. Ne haussez pas des sourcils dubitatifs ou des épaules dédaigneuses.
Comment donner l’envie, le désir si tu ne l’as pas toi-même ? Bien sûr, après, il y a la technique, le savoir- faire. Ce qu’on appelle la pédagogie. Mais sans cette envie - cette foi, allais-je – tout ça risque d’être justement trop technique, un peu désincarné. Pas très humain. Certes perfectible, parfois bricolé, pas toujours au top. Mais très efficace.

Après, il y a des débats sur l’emploi de telle ou telle méthode. Débats techniques, pugilats à coups de mots, injonctions et noms d’oiseaux, parfois. Ridicule, souvent. Néfaste, toujours. Mais ce n’est pas le plus important. L’essentiel, c’est d’y croire et de donner l’envie.

L’optimisme à tout crin. Parions sur ce cheval là. Même avec un lourd handicap, il franchira les haies et la ligne d’arrivée.

Peut-être en vainqueur. Qui sait ?

27 octobre 2006

Drôle d’anniversaire


Avec ce temps estival d’automne, je me suis dit : tiens je vais aller faire quelques photos dans le quartier. Je me suis donc baladé, presque comme un touriste, au pied des trois grands immeubles qui jouxtent l’autoroute et qui vont être démolis en 2008.
Je vais de temps en temps dans ce qu’il reste de ce quartier de Montchovet faire des clichés qui serviront de mémoire et, qui sait, donneront peut-être matière un jour à un livre ?
J’ai rencontré là deux de mes élèves. Qui tournaient en rond, désoeuvrés, dans le minuscule square qui leur sert de terrain de jeu et d’évasion.
Ils étaient sincèrement heureux de me voir là – « c’est le maître ». On a fait quelques photos, bien sûr, et je leur ai expliqué pourquoi je faisais ça. Ils ont tout de suite compris l’enjeu de la démarche. Quelques grands se sont joints à la conversation. Re-séance photos, pour les plus grands, bien sûr.
Il y avait le soleil, merveilleusement tiède, et nous, au pied de l’immense barre bleue, avec quelques paraboles ici et là. Il doit rester tout au plus une vingtaine de familles en attente imminente d’un logement. Avant que tout tombe sous les assauts des grues et des bulls.
Il y avait aussi, ce matin-même, à la radio, des reporters qui parlaient « d’anniversaire » : il y a tout juste un an commençait l’embrasement des quartiers et des banlieues.
Ici, ça n’avait pas tellement bougé, ou brûlé. Quelques escarmouches ici ou là. Ça aurait pu, pour un quartier en fin de vie et dans lequel les quelques habitants qui restent se débattent dans de grosses galères.
J’ai donc parlé avec eux, ces jeunes amers et désabusés, qui ne croient plus à grand chose.
Ils allaient donc être obligés de partir d’ici : un crève-cœur pour eux. Pourtant, le tableau est loin d’être idyllique, avec ces grandes murailles laides, ces allées sombres et inhospitalières au possible. Et le ronflement incessant de l’autoroute à deux pas.
Mais, m’ont-ils dit, « c’est toute notre vie qui est ici. » Leur territoire, bien à eux. Et toute leur enfance, et les copains. Et toutes les rigolades et les coups tordus. Tout dans le même sac. La vie, quoi. Leur vie d’avant, qui allait être démolie. Eux aussi, du coup, se sentent fragiles, friables.

Dans leur tête, pour certains, un vaste chantier de démolition.

Qui va pouvoir les aider à reconstruire tout ça ?

25 octobre 2006

Tout sauf baisser les bras


Et voilà !
Ça fait 7 semaines de passées. Un petit coup d’œil dans le rétro.
De très préoccupante au tout début, la situation de la classe est devenue…disons à peu près gérable à la fin.
Remarquez bien : je n’ai pas dit normale. Parce que je ne me leurre pas. Avec eux et avec tous les problèmes qu’ils ont, cette classe ne sera jamais vraiment comme une autre.
On a commencé à poser des jalons, à mettre petit à petit et avec beaucoup de patience et d’obstination des rituels, un début d’organisation. Certains ont commencé à prendre conscience. Au fil des jours, des dialogues, des punitions ( eh oui, ça arrive) , des remarques, des mises au point, des remises au point ( j’ai pas dit au poing ), on a trouvé un début d’amorce de commencement de modus vivendi.
Mais tout ça si fragile, si précaire. Que la moindre anicroche pouvait remettre en cause.
Ils ont une attention si volatile avec un tel besoin d’écoute et de prise en compte de leurs problèmes. Chacun veut qu’on l’écoute, veut aussi parler, et souvent en même temps.
Des choses se sont mises en place. Il y eut quelques séquences d’où je repartais, et eux aussi, assez paisiblement, en me disant : tiens, là, ça le fait, on a pu avancer et s’écouter.
Mais le chemin est encore long, très long. Le projet personnel de réussite, pour quelques uns, ce sera une réussite toute petite, bien modeste. Un projet à leur hauteur, à leur échelle. Une échelle avec peu de barreaux. Mais l’essentiel est qu’ils les grimpent, ces foutus barreaux. Et, qu’en fin d’année, ils se tiennent un peu plus haut.
Si l’élève ne s’élève pas, et si on ne l’y aide pas par tous les moyens, alors à quoi ça sert qu’on soit là et qu’ils soient là ? A quoi ça servirait, alors, l’école ?
Modestes on est partis, modestes on restera. Tout sauf baisser les bras. Tout sauf l’impuissance ou le désespoir.
C’est sûr, j’aurai des doutes. C’est sûr, je vais perdre patience par moments. Ou je vais piquer quelques colères. Mais ne pas redouter le doute. Après tout, simplement humains nous sommes. Rien qu’humains. Et, pour cela, jamais vraiment désespérés. Croire à l’impossible, ne pas renoncer.
Ni eux ni moi.

24 octobre 2006

Pour qui le psy ?


Bienvenues, ces vacances de Toussaint.
J’ai une batterie qui tient un peu plus qu’un portable, certes : 7 semaines, c’est déjà pas si mal.
Mais là, elles étaient vraiment à plat.
Rien que là, ce mardi soir, de savoir que je vais penser à autre chose qu’à la classe, qu’à CETTE classe… rien que ça, et ça va déjà mieux.
OK, je sais : il y a des tas de boulots où tu n’as pas cette chance de pouvoir t’arrêter une semaine et demie toutes les 7 semaines. Je mesure bien cette chance-là.
Mais, franchement, s’il n’y avait pas ça, je me demande si ça serait jouable. Bien sûr, si on n’avait pas le choix, on le ferait.
Mais là, avec mes zozos, certains jours, j’étais à la limite de l’implosion.
Ironie de la situation : j’ai parlé plusieurs fois, avec la psychologue scolaire, de l’état mental plus que préoccupant de certains de mes élèves. J’ai eu un entretien avec les géniteurs de ces petits si perturbés.
Mais, je dois l’avouer, c’est moi qui aurais dû AUSSI avoir les services d’un psy. Histoire, déjà, d’avoir quelqu’un à qui parler de mes problèmes, de leurs problèmes. Avoir au moins, faute de conseils, une écoute, une oreille à qui se confier.
Souvent, on est cons : on n’ose pas parler de ses difficultés. Pourquoi, après tout, en aurais-je ? Si, après 33 ans de pratique, j’y arrive difficilement … Alors, comment vont les autres, surtout ceux qui débutent ? Bref, on s’autoculpabilise. On devrait pas.
On devrait avoir un soutien psychologique, nous aussi. Avant de péter un câble. Alors , on prend sur soi, on s’engueule, on se remotive, on s’auto-analyse, on s’introspecte. Pas trop bon tout ça parce qu’on reste en vase clos, entre soi et soi.
Combien qui sont dans ce cas, comme moi, et qui ne disent rien, et qui souffrent en silence. Cette fameuse loi du silence. Tout doit être sous contrôle, toujours. On est des professionnels, des vrais. Tu parles ! Rester dans le politiquement correct.
Alors, je rompts cette p… de loi du silence. Je m’épanche. Je fais part ouvertement de mes doutes, de mes faiblesses. Je pense que je ne dois pas être le seul dans ce cas, d’après ce que j’entends, ici ou là.
Si je me trompe, arrêtez moi.

20 octobre 2006

Ça va mieux en le disant


Discussion à bâtons rompus avec mon fils de 22 ans. Un de ses potes galère un maximum avec sa classe, du côté de Givors. Il faut dire que ce pote-là est passé par ma classe, il n’y a pas si longtemps, lorsqu’il était en formation à l’IUFM. Il débute juste… tout frais et déjà moulu dans une classe pas évidente d’une école d’un quartier « sensible », givordin donc – au bord du Rhône.
On va donc essayer de se voir rapidement. D’abord pour parler de ses soucis. Et puis pour voir ensuite comment il peut faire, très concrètement, pour gérer ces gamins apparemment pas évidents du tout à gérer.
Vous me direz : il va donner des conseils alors que lui aussi, il semblerait que ça ne va pas très fort avec ses propres ouailles…aïe aïe aïe !
Primo, après le début très hard de ces premières semaines, il semblerait que ça va un peu mieux. On s’apprivoise mutuellement. À moins qu’ils commencent à comprendre ce que j’attends d’eux.
Mais bon, je ne me fais pas d’illusion.Va y avoir des hauts et des bas. Et plutôt plus de bas que de hauts. C’est pas du cynisme quand je dis ça. Les montagnes russes de la pédagogie, ça me connaît. Et quand on prend un ticket pour toute une année scolaire, vaut mieux avoir les idées claires et l’estomac bien accroché.
Pour l’estomac, pas de problème. Pour les idées, pas de souci non plus. Non, ce qui me tracasse, c’est la mise en musique de ces idées. La pratique quotidienne. La gestion du groupe et des individualités, des particularités. Vraiment très très particulières cette année.
Ce sera donc une année particulière. Why not, my dear ?

16 octobre 2006

La lecture, ça rend baba


« B et A, ça fait BA et quand on le dit deux fois, ça fait BABA . »

Devant une telle citation, on peut rester baba. C’est pourtant un ministre qui a dit ça. Et pas n’importe lequel : le ministre de l’Education Nationale. Donc, mon patron.

Je reste donc soit confondu devant tant d’à propos soit consterné devant tant d’inanité.
Comme il s’agit de mon patron, j’opte pour la première solution. Je comprends bien ce qu’il a voulu expliquer, le boss : il faut revenir à des choses simples. Quitte à faire simpliste.
Sauf que, avec tout l’immense respect que je lui dois, la lecture, c’est pas si simple que ça. Et que la langue française, c’est complexe. Même à six ans, au C.P., ça ne s’enseigne pas si facilement.
S’il suffisait juste de faire des accrochages aussi fastoches …T et I, ça fait TI, bien évidemment, n’est-ce pas, mon PETIT ? Mais il faut faire bien ATTENTION, comme dans ce mot, justement.
Il y a aussi le mot, et puis le texte et le contexte. On sait tous ça. Même si on n’est pas tous ministres. Et on peut rester baba sans être forcément au rhum. Et tous les chemins de lecture ou d’écriture ne mènent pas au RHUM. Surtout que si tu ajoutes un E, ça change tout, prononciation et sens. Sortez vos mouchoirs ! Sans compter que si on est petit ou musulman ou contre l’alcool, tout simplement, on ne connaîtra jamais tout le goût, les fragrances et les subtilités de ce mot-là.

Mauvaise démonstration, donc. Et mauvais procès. Faux débat, dans tous les cas. Perte de temps, d’énergie, de sens. S’en tenir aux programmes, à ce qui a été élaboré, défini, approuvé par une commission prévue pour. Les I.O., ça s’appelle. Officielles, ces Instructions-là. Pas de contestation possible : on est tous payés pour les appliquer, les mettre en musique. Ce qu’on a toujours fait, d’ailleurs.

Alors, le B-A BA, écran de fumée ? Sûrement, aussi. Pas là le débat. Pas là du tout.
Rester cool, sans être baba-cool. Pas s’énerver. Moi qui vous cause, j’en ai connu quelques uns, de ministres…qui sont passés. Et pour certains, aux oubliettes.

C’est peut-être là, le nœud du problème : ils veulent laisser leur marque dans la postérité ; être LE ministre qui… Et c’est pas facile, comme exercice. Surtout devant micros ou caméras. Mais c’est le jeu des médias, surtout en ce moment : pousser à la faute, à la recherche de la petite phrase qui sera reprise partout. A ce petit jeu, certains ou certaines sont meilleures que d’autres.

Qui va distribuer les bons ou mauvais points ?

15 octobre 2006

Quelle égalité ?


Vous avez remarqué, c’est le refrain à la mode, presque une antienne – prononcez ça comme vous voulez : L’EGALITE DES CHANCES.

Belles intentions. Ça reprend même une des devises de la République. Et on prend même soin de rajouter, comme si ça suffisait pas : POUR TOUS.

On vit dans un beau pays, tout de même. Figurez vous que j’ai même rencontré et serré la main du personnage – il existe pour de vrai, il respire, boit et mange comme vous et moi, ce n’est pas un concept, une idée, non non – j’ai donc parlé pour de bon à celui qui est à la tête du
« ministère de l’égalité des chances. »

Faut pas rigoler avec ça. Je vais pas, d’ailleurs. D’abord, je le trouve plutôt sympathique, Azouz Begag. Azouz, comme tout le monde l’appelle. Ils s’adorent tous dans ce gouvernement. Et du Nicolas par ci. Et du Jean-Louis par là. Avec Dominique ou Jacques, ça semble un peu plus difficile. Mais bon, il est vrai qu’on arrive dans la stratosphère…

Donc, Azouz, respectable et tout. Et il y croit, à son truc. Il mouille le maillot. Il fait pas semblant, le gone ! Comme tout bon banlieusard de Lyon – qui n’est qu’à 60 km da la capitale des Gaules – je l’avais bien connu et apprécié en tant qu’écrivain plutôt talentueux, très sympathique et tout et tout.

Mais bon, « l’égalité des chances », c’est un beau titre pour une fiction. Dans la vie, la vraie, le premier benêt venu sait que c’est du pipeau. On raconterait même pas ça aux petits enfants pour les endormir le soir : « Ils eurent beaucoup d’enfants qui vécurent heureux au beau royaume de l’égalité des chances. » Bonne nuit …Dormez bien.

C’est un peu comme si moi, le directeur de cette école, je faisais marquer sur mes cartes de visites : « Gérard DI CICCO - Maîtrise d’Egalité des Chances. » Remarquez, ça en jetterait un max, non ?

Car, bien sûr, « l’égalité des chances », ça n’a jamais existé et ça n’existera jamais. Il faudrait toujours l'encadrer de guillemets, comme je le fais d'ailleurs ici. Selon que vous naissez rue Pierre Loti, rue Edgar Degas ou Cours Fauriel, c’est pas tout à fait pareil.
Selon que vous vous appelez Charles-Edouard, Latifa ou Samir, vous ne partez pas dans la vie avec les mêmes bagages, sur le même quai, dans le même train.

Au slogan racoleur et trompeur « d’égalité des chances », je préfèrerais un autre programme :
donner les mêmes moyens à toutes et à tous. Et, si possible, donner un peu plus à celles et à ceux qui démarrent dans la vie – dans des quartiers et des banlieues – où il faut en faire bien plus pour s’en sortir. Donc, juste retour des choses.

Sans tomber dans la « discrimination positive », non plus. Autre concept, d’origine bien anglo-saxonne, qui est en lui-même un fort déplaisant oxymore : je te discrimine, mais t’inquiète pas, c’est pour ton bien, tout ça est très positif, en fait. Tu parles ! Autant parler de racisme égalitaire, aussi, tant qu’on y est, ou de violence pacifique !!!

Tout ce que veulent ces enfants et ces jeunes, c’est qu’on leur donne de vrais moyens pour y arriver. Ils veulent le faire avec leur propre mérite, avec leur intelligence et leurs talents. Et ils en ont, pour beaucoup d’entre eux. Question de dignité et d’orgueil.

Egalité de moyens, donc. Qu'on y mette le paquet, tant qu'on y est. Pour le coup, ça voudrait vraiment le coût, un challenge pareil.

Qu’on laisse la chance aux casinos et aux joueurs de loto.

14 octobre 2006

Not so bad but not so nice


Une de mes amies, qui est allée sur mon blog, trouve le ton assez pessimiste. En gros, et avec des gants, elle veut signifier que ce que je dis n’est pas très marrant marrant.

Elle a sans doute raison.

Il faut que je me méfie de ça : le cynisme. Ce n’est pas parce que je fais ce boulot depuis maintenant 33 années – fichtre – que je dois sombrer…dans le sombre.
Pas faire non plus dans l’idyllique. Faut pas déconner. On n’est plus des enfants. Même et surtout s’il s’agit ici d’enfants, de leur présent et, un peu, de leur avenir.

Alors OK, Catherine – elle s’appelle Catherine, ou Cath pour ceux qui la connaissent bien –
on va mettre plus d’humour dans tout ça. Youkaïdi !!!

Mais ça ne m’empêchera de décrire les choses comme je les vois et comme je les vis. Sinon, à quoi bon bloguer et s’épancher sur le Net ? Si c’est juste pour débiter de la guimauve… il y a la télé et pas mal d’émissions et de feuilletons pour ça, non ?
On est juste là et je suis juste là pour parler de la vraie vie. Avec des hauts et des bas. Avec des vrais gens.Qui vivent, tout comme moi, des jours avec et des jours sans. Pas question d’embellir, de faire du soft avec du hard. Parce que ce que vivent ces gamins et ces familles, c’est pas toujours « l’île aux enfants. »
Ici, on n’est pas à Mickey-ville. Et même si les choses s‘arrangent, et encore pas pour tous, il y a encore du désespoir et des galères pour pas mal d’entre eux.

Alors promis, je tricherai pas. Il n’y aura pas non plus de scoops, du sensationnel. Laissons ça aux médias, et au public qui en est friand. Ben oui : il y a de l’offre parce qu’il y a de la demande ; et un marché pour ça. Tout le monde sait ça. Et ça chiffre en millions d’euros. On dirait même que le passage à l’euro a multiplié par 6, 56 et quelques les appétits, les bénéfices, les recettes. Mais par pour tous… Pas pour tous.

Bon Ok, je diverge, je m’égare un peu.

Promis, donc, je vais faire attention à ça. Il y aura une colonne « plus » et une colonne « moins ». Histoire d’équilibrer le menu.

A bon blogueur, salut !

12 octobre 2006

Pas facile !!!

Les pédagos, c’est bien connu, adooorent les réunions. Il paraîtrait même que certains se réuniraient pour discuter de l’opportunité et du contenu éventuel de la prochaine réunion…
Mouais…
Ça, c’est le cliché fastoche. Des fois, les réunions, ça sert … et pas seulement à se réunir.
Donc, à une de ces réunions, un de ces pédagos ayant déjà de la bouteille aurait dit : « On fait un métier pas facile ! »
Il parlait, bien évidemment, du boulot d’enseignant.
S’il entendait par là qu’on a affaire à des petits d’hommes et dans une société traversée par des doutes et des angoisses multiples, il a raison de dire cela.
Mais c’est justement parce que ce sont des petits d’hommes que ce que nous faisons est passionnant. C’est justement parce que cette société les trimballe, et nous avec, dans des croisières parfois agitées que ce que nous faisons avec eux a un sens.
Et puis il y a aussi ces regards qu’ils ont, ces émerveillements, encore, ces têtes penchées sur les cahiers, ce besoin d’être reconnu, et ce désir, tout de même, de comprendre et de grandir.
Il y a aussi, au-delà des difficultés ou du stress, ce lieu unique, la classe et l’école, où tous apprennent à vivre ensemble.
Métier pas facile, certes, mais dont la difficulté fait tout l’intérêt. Et même la beauté. J’aime bien lorsque je décline ma profession qu’on me déclare : « Vous faites un beau métier. »
Je le prends non comme un compliment mais comme une évidence : nous faisons effectivement un « beau » métier. Ça, je ne l’ai jamais oublié, même quand ce n’était pas facile. Et encore aujourd’hui, où ma mission touche à sa fin.

07 octobre 2006

Désir de classe


Cela fait un peu plus d’un mois que nous sommes ensemble, les élèves et moi.
Pour faire court, on va dire que ça va un peu mieux.

À savoir : on commence à entrer dans les apprentissages ; il y a de moins en moins de situations bloquées ; les « manifestations psychiques intempestives » s’estompent, tout doucement, un peu comme un fleuve en crue qui regagne doucement son lit d’origine.
Globalement, disons que la classe est à peu près vivable.
J’essaie, et les collègues avec moi, d’analyser pour comprendre, un tant soit peu. On ne peut en effet s’en tenir à l’amer et ressassé constat : les élèves de maintenant sont plus difficiles que ceux d’avant. Une fois cela dit, et reste à vérifier si c’est vrai partout et tout le temps, il reste à séparer l’irrationnel du rationnel, le ressenti du réellement vécu.

Tenons nous en à ce qui nous concerne, à savoir cette école de quartier.
Premier constat : il faut bien un bon mois que les enfants que nous avons accueillis fin août commencent à prendre conscience que, le portail franchi, ils deviennent des élèves avec les devoirs et les contraintes que cela suppose.
Pour certains, c’est assez facile. Pour d’autres, c’est un peu plus long. Et, pour certains, ça risque d’être encore très long, avec des hauts et des bas.

Mon gros souci, ce n’est pas tant la gestion de ce groupe classe si particulier – et c’est un vrai euphémisme, croyez-moi, - non : mon gros problème, c’est ma motivation personnelle.
On en parle très peu, de ça : l’envie. Envie de se lever le matin, de préparer sa classe, d’anticiper un tant soit peu ce qu’on va faire et leur faire faire ; envie d’être avec eux et pour eux ; envie qu’il se passe tous les jours quelque chose avec eux ; envie de leur faire partager ce qui peut être un vrai plaisir, une vraie aventure, cette découverte ensemble de tout ce savoir, là devant eux, comme une immense contrée qu’on va découvrir pas à pas.

Cette envie qui me fuit, s’enfuit au loin. L’écart, gigantesque, entre ce que j’ai prévu de faire avec eux et ce qu’ils en font, réellement… Cette énorme frustration qui m’envahit le soir, juste après la sortie, ce fameux moment entre 17h35 et 17H45. Ils ne sont plus là mais ils sont encore dans ma tête. Pire : je relis mes notes, prises à la hâte dans la journée sur untel ou unetelle. Et le découragement me gagne, avec l’inévitable fatigue physique et morale.

Je sais bien, en pédago averti et presque madré, que ce n’est qu’une question de temps. Qu’il n’y a pas plus ingrat que la pédagogie. Qu'il faut remuer des tonnes de matériaux, parfois, pour n’avoir que quelques milligrammes d’or au bout, ou parfois rien. Qu'on sème et qu'on ne sait pas quand ça va vraiment germer et même si ça va germer un jour …

Mais il y cette question lancinante : pourquoi vais-je au boulot tous les matins à reculons ? Moi qui ai toujours adoré ce métier et qui n’en aurais pas voulu un autre ? Ce n’est pas une question d’âge. On peut, ici comme ailleurs, se renouveler, redémarrer chaque année scolaire avec de nouveaux élèves, de nouveaux enjeux.

Je commence à entrevoir un début de réponse : parce que j’ai bien peur que, pour certains, quoi qu’on tente, il n’y ait déjà plus grand chose à faire. Trop de déterminismes, de handicaps, d’obstacles, d’ornières.

Je sais : c’est terrible à dire, comme ça, froidement. Quand on sait qu’éduquer, c’est justement ne jamais renoncer, toujours espérer, croire à l’impossible, penser l’impensable.

Mais là, cette année, je me force, je me mets un grand coup pied au cul tous les matins de classe. Je m’exhorte, me morigène in petto « Putain mon vieux ! Bouge toi la couenne ! Vas-y, au charbon, encore et encore ! C’est pas maintenant que tu vas renoncer ! C’est un sacré challenge que tu as là…. »

Franchement, là, maintenant, je sais pas ce que ça va donner. Je vais le faire, c’est sûr, j’ai pas bien le choix : un fonctionnaire, fatalement, ça doit fonctionner.

Mais pour l’envie, je crois que ça va être dur. Pas la grande classe, pour 2006-2007.

06 octobre 2006

Eux et nous


Eux tout là haut. Dans les arcanes du pouvoir.

Mesurent-ils vraiment ? Question pertinente posée par un de mes collègues, lors d’une surveillance de récré que nous effectuions tous les deux.

Bien sûr qu’ils mesurent. Ils savent bien ce qu’ils décident et font. Il n’y a pas d’improvisation à ce niveau d’Etat. Sinon ils ne seraient pas là. Déjà. Là haut. Et nous, nous ne serions pas là, en bas. Ce serait l’inverse. Peut-être…

À eux de décider, de trancher. À nous de faire, d’exécuter, bon an mal an, quoi qu’il nous en coûte. C’est la règle du jeu.

Pas bien le choix, d’ailleurs. On peut avoir des états d’âme. Momentanément. On peut défiler dans les rues. Aussi.

Mais, au bout des comptes, on ne peut se défiler. On nous paie pour gérer ce quotidien là. Celui de tous ces enfants qu’on accueille, jour après jour. C’est à la fois un boulot, pour lequel on est rétribué, et aussi une mission. Encore, pour le moment, de service public.

Certes, ça devient de moins en moins évident et ça ne devait sûrement pas l’être plus pour les hussards noirs de lé république partis alors à l’assaut de l’ignorance des campagnes. Ou luttant pied à pied contre le cléricalisme ou, tout simplement, contre la bêtise humaine.

Ils savent tout cela, nos dirigeants. Il y a bien une logique, descendante, qui part de Gilles de Robien pour arriver à Gérard Di Cicco. Quand celui là, en haut et devant micro ou Assemblée, énonce quelque mesure, celui-ci, en bas dans son école de quartier, devant élèves et parents, doit bien les mettre en musique, lesdites mesures. Et, si possible, avec discipline et efficacité. Sans trop d’états d’âme. Les états d’âme n’ont jamais appris aux élèves à lire ou n’ont jamais effectué de règle de trois.

Chacun est donc bien à sa place. Ce n'est pas dans le meilleur des mondes. Franchement, ce n'est pas dans le pire non plus.

On devra s'en contenter.

05 octobre 2006

A grande idée…gros soucis



On le savait que cette loi du 11 février 2005, ça serait pas de la tarte.
On se doutait bien qu’ouvrir toutes grandes les portes des écoles pour y accueillir à bras ouverts les enfants ayant un handicap poserait pas mal de problèmes.
Mais à ce point, personne n’aurait osé l’imaginer.

Personne, bien évidemment, ne peut aller contre cette idée généreuse et si belle en soi : tout enfant, quel que soit son problème, doit être traité à égalité avec les autres. Pourquoi mettre à part un élève parce qu’il n’est pas tout à fait comme les autres ? Après tout, il a autant de droits que tout un chacun !
Donc, on inscrit TOUT LE MONDE – everybody is invited – et après…on gère.
Sauf que le « on » c’est … devinez qui ? A qui est-ce qu’on va refiler la patate brûlante ou le mistigri ? Vous avez trouvé : aux directeurs – et souvent -trices. Ben voyons.
Maintenant que le problème de la direction est définitivement réglé, n’est-ce pas : un PE2
( pas formé du tout) un jour par semaine et 15 € de plus par mois. Roule ma poule : les zécoles sont sauvées.

Elles sont même prêtes à accueillir tout le malheur du monde. Elles le faisaient déjà, remarquez. Mais qui peut résister à cette injonction, ce mot d’ordre venu du plut haut de l’Etat : accueillez, prenez en charge ?

Et comme dans l’armée, ça cascade et ça descend : du chef de l’Etat au ministre puis aux recteurs puis aux inspecteurs d’académie puis aux inspecteurs tout simples puis aux … directeurs . Et voilà, on y est.

Je vous explique pas le tableau – simplifié (sic ) – qu’ils ont osé nous refiler pour nous expliquer la marche à suivre : ça tient dans une page A4, bien remplie la page ; c’est plein de rectangles, d’ovales avec des flèches de partout, en pointillés et en plein . Un vrai chef d’œuvre de bureautique informatique. Le mec qui a fait ça, y a pas à dire, c’est un pro.

Et tout ça pour… un élève.

A ce stade, on peut être soit émerveillé, soit interloqué.

Emerveillé en se disant que, décidément, l’Education Nationale, qu’on critique beaucoup, met vraiment le paquet pour TOUS les enfants de ce pays, quels qu’ils soient.

Interloqué, en se demandant comment on va pouvoir gérer ce bazar au quotidien. Une usine à gaz, à côté, c’est un opinel !

Mais bon : comme nous a dit le CPC ( Conseiller Pédagogique de Circonscription ) très compétent et spécialement habilité au décryptage du modus operandi…cap : la loi a été votée par les représentants du peuple On n’a pas à avoir d’états d’âmes, encore moins des tas d’âmes . On est des fonctionnaires et on doit donc faire fonctionner ce que les représentants du peuple ont adopté.

Exécution !!!!

03 octobre 2006

Contraints de réussite



J’voudrais bien les voir.
Tous ceux qui parlent de contrat de réussite, et qui assènent, décrètent même ça comme si c’était une évidence.
Je te tricote un gentil petit PPRE ( Projet Personnel de Réussite de l’Elève ). Je te convoque les parents et je te leur explique ce pour quoi leur rejeton a droit à tant d’égards du genre : z’inquiétez vous pas, parents concernés et père et/ou mère d’icelui ou d’icelle. Z’êtes pas vraiment arrivés à tirer la substantifique moelle de votre progéniture ? Mais, ensemble, vouzénous, on va y arriver. C’est pas pour rien que ça s’appelle « de réussite ».
On s’y engage par contrat : le contrat de confiance. Ah bon ? ça vous rappelle quelque chose. Oui bon, on vend pas des télés ou des lave-vaisselle. Mais puisqu’on vous assure qu’on va y arriver…

En attendant, PPRE ou pas, pour mes 14 loupiots, toujours là un mois après la rentrée, eh ben, c’est pas gagné d’avance. Je me lève dès potron-minet, voire même plus tôt, pour te leur concocter des fiches aux petits oignons qui soient accessibles et intelligibles à leurs petites cervelles certes en éveil mais tout de même très agitées.
C’est pas du quatre étoiles ; je ne suis certes pas le Bocuse de la pédagogie – loin s’en faut – mais j’essaie de leur composer un menu qui soit appétissant : c’est à dire qu’il faut qu’il leur donne envie de se mettre à table et qu’ils goûtent à tous les aliments que je leur propose : grammaire, vocabulaire, orthographe, lecture, numération, problèmes, technologie. J’y ajoute même une pincée d’arts visuels, un soupçon de lutte, de hockey ou de gym au sol.
Aujourd’hui, ils ont eu bon appétit : certains en ont même redemandé. En plein ramadan !
Comme quoi…

30 septembre 2006

Teacher’s song

Tiens aujourd'hui si on s'faisait l'école buissonnière avec une p'tite chanson ?
Si quelqu'un connaît la musique ?.....

1
Moi j’suis qu’instit dans une école de quartier
C’est sûr j’passerai jamais aux actualités
C’qu’y veulent au 20 h c’est des bagnoles qui crament
Pas un p’tit fonctionnaire discret qu’a des états d’âme

REFRAIN

Attention ! Enfants
Attention ! Allez-y douc’ment
Attention ! Fragiles ces mômes là
Même s’ils s’la jouent Godzilla

2
Moi ça m’plaît bien quand y arrivent le lundi matin
P’tits oiseaux tombés du nid les gestes incertains
Moi j’aime bien quand i m’disent au r’voir m’sieur à lundi
Au cas où j’aurais oublié qu’ils comptent sur moi pardi

3
Moi l’p’tit fils d’immigré j’connais l’poids des mots
Quand on m’traitait d’macaroni moins que zéro
C’est pas une revanche juste la République qui rend la monnaie
A ceux qu’ont trimé sans rien dire et qui en secret rêvaient

4
Moi l’dirlo de c’t’école d’un quartier sensible
J’ai pas d’regrets mais faut pas s’tromper d’cible
Pour un qui pète les plombs et qui s’enflamme
Y a des tas qui vont bien qu’ont pas d’états d’âme

5
Pour un qui s’la joue rebelle et siffle la Marseillaise
Combien qui bossent étudient sont partout à l’aise
Pour un dealer qui pourrit à lui seul un quartier
Combien partent dans l'matin blême vont trimer

6
Moi l’instit’ j’ai qu’mon boulot et rien d’plus
Une rentrée tiens comment s’ront les nouveaux v’nus
Jamais baisser les bras mêm’ devant les têtes de bois
A force d’arroser ça s’met à germer qu’est-ce que tu crois !

7
Moi d’vant le tableau j’r’pense à Sofiane sous l’ascenseur
Son maillot d’rugby trop large pour son grand petit cœur
J’r’vois idem Jacky et son p’tit air froissé chafoin
Parti lui aussi, la vie des fois c’t’une vraie putain

8
Moi l’pédago d’base j’en ai vu défiler des tas d’ mômes
C'est sûr ceux d'alors sont maint'nant dev'nus des hommes
Moi l’fonctionnaire par la république chich’ment rétribué
Jour après jour pas baisser les bras et bien fonctionner

9

Nous les hussards d’la République sans illusion et sans blouse
Encore debout dans la tempête mêm’quand les cités ont l’blues
On continue à parler d’futur pas qu’dans la conjugaison
Y croire encore toujours pour chaqu’ problème un’ solution

10
On est des milliers comme ça contre vents et marée
On sait bien qu’si on est là c’est pas pour s’marrer
Mais on doit bien servir à quelqu’ chose bon sang
Mêm’ si parfois on râle quand c’est pas évident






29 septembre 2006

Minutes magiques


Vous ai-je parlé de ces minutes magiques ? Celles qui suivent invariablement la sortie des élèves le vendredi ?
Ces quelques minutes futiles, fugitives et essentielles entre 17h33 et 17h 38.
17h30 : on se retrouve tous dans les escaliers. Certains élèves sont plutôt paisibles. D’autres, beaucoup, comme des chevaux fous, ne peuvent se contenir, trop brimés qu’ils ont été par tout ce que leurs « maîtres » ou « maîtresses » ont exigé d’eux durant toute la semaine.
Ils piaffent, cavalcadent, lancent presque des ruades, hennissent quasiment pour certains.
Lancent un tonitruant « aurevoirmaîtralundi ».
Certains, un peu plus policés, un peu plus attentionnés – il y en a – se risquent à un timide
« Bon week-end » avec même un petit sourire en coin, du genre « vous en aurez bien besoin, peut-être même plus que nous, avec tout ce qu’on vous a fait subir cette semaine »…
Et, à 17h33, tout est soudain si vide et silencieux. Les derniers sont encore dans la pente, au bas de l’école, cartable au dos.
Vous ai-je dit que ce sont peut-être mes minutes préférées ? Pas encore dans la parenthèse bienvenue et salvatrice du week-end et la tête encore emplie de tout ce qu’ils ont dit, fait, demandé, questionné.
Quelques minutes comme un sas. Je ne compte plus pour eux et eux pour moi. Coupure jusqu’au lundi.
Et le manège se remettra à tourner.

27 septembre 2006

Un petit pas puis un autre

Ne pas vouloir aller trop vite avec ces gamins-là. Pas d’impatience.
La qualité première et indispensable dans ce boulot : la patience.
Cool. Super cool.
C’est un peu comme un fruit vert. Laisser la nature et les rayons du soleil faire leur boulot.
Et se dire que, modestement, on est juste un de ces rayons de soleil. Rien de plus. Rien de moins.
Belle image, non ? Et les élèves, eux, du haut de leurs huit ans, qu’en pensent-ils vraiment ?
Que ressentent-ils ? Comment les vivent-ils, ces journées de classe ?
Ce ne sont que des enfants, après tout …
Ce sont des enfants, avant tout.
Et ça, c’est plus important que tout.

25 septembre 2006

Les 7 piliers du socle

Par décret et au Journal Officiel, s’il vous plaît, a été défini tout ce que doit savoir un
Petit Français à l’issue de sa scolarité obligatoire.

Bon, franchement, c’est plutôt pas mal comme idée : que tous les enfants d’un même pays partagent les mêmes repères. 
Intention louable.
Bon, franchement encore, dans les faits, et au quotidien de l’école, c’est beaucoup moins évident. Pas qu’on veut pas essayer. On est même payés pour ça, aussi, non ?

Mais, les petits loupiots, on les a que 6 à 7 heures par jour et 4 jours par semaine. Pas plus.
Quand on y pense, c’est à la fois peu et beaucoup. Peu parce que si on enlève les mercredis, les samedis et dimanches plus les jours fériés et les vacances, il doit rester 185 jours de classe sur une année scolaire.

C’est sûrement suffisant pour leur faire acquérir les compétences de base nécessaires.

Mais alors, on fera ce qu’on pourra et au maximum de ce de ce qu’ils peuvent faire.

Voilà.

21 septembre 2006

Que du vrai

Vu et entendu sur le Grand Journal de Canal Pluche – en clair, of course, chuis pas zabonné :
La minette qui faisait un carton avec ses vidéos plus vraies que vraies sur son blog et ses déconvenues amoureuses était en fait… une comédienne. Tout le monde s’est fait avoir. Les gens sont naïfs. A moins que, avec les images, on arrive toujours, au bout du compte, à se faire avoir. Manip et faux-semblant.
Le contraire du faux-semblant, alors ? Ben … la vie réelle, la vraie. Avec ses soucis, ses emmerdes, ses petites joies et ses difficultés. Pas de quoi affoler l’audimat. Oh dis mate moi la minette, ça, ça marche et ça attire comme le miel les mouches. Et quand je dis miel, je fais soft.
Je vais pas encore vous bassiner avec mon boulot. Bon, c’est vrai, ça me prend la tronche une bonne partie de la semaine. Et si je vous disais que rien qu’aujourd’hui, il s’est passé de ces choses… De quoi alimenter une bonne rubrique de blog.
Mais, je n’en parlerai pas. Pas un mot. Pas le cœur ni le goût à ça. Un peu plus de dix heures de ma vie publique que je vais zapper allègrement. Histoire de faire le vide. Penser à autre chose. Sinon, je vais péter un câble ou autre chose. Je sais pas. Mine de rien, la mécanique humaine, c’est délicat. J’ai l’air costaud comme ça, mais en dedans...
Alors, ce soir, j’ouvre la parenthèse. Histoire de me préserver. C’est long, une année scolaire, très long.
Alors, je mets sur pause.
Pause.

19 septembre 2006

Voilà voilà voilà

Bon … je vais pas faire le malin. Super pédago is burn out. Traduction : j’ai fait ce que j’ai pu aujourd’hui mais ça pas été facile. Doux euphémisme …Entre ce que j’avais prévu et ce qu’ils ont réellement fait, le grand écart.
Bon…c’est mon 2ème « bon » de la soirée et quand on dit ça, psychanalytiquement parlant, ça veut dire que ça ne va pas si bien que ça.
Effectivement. Avec ces gamins-là, j’ai vraiment l’impression d’être Yves Montand dans le Salaire de la Peur. Je pilote un camion de nitroglycérine et gare aux secousses. J’ai beau être un as du volant et slalomer entre les trous, j’arrive pas à tous les éviter. Et boum ça fait boum et mon cœur fait boum à chaque fois.
Tout ça n’est pas très glorieux, j’en conviens. On va se revoir lundi prochain avec le RASED pour le deuxième épisode de la saga : aide aux élèves en difficulté.
Question subsidiaire : qu’est-ce qui est prévu pour les maîtres en difficulté ? un RAMED ?

16 septembre 2006

Dirlo diladado !?!?!?


« Les profs ne veulent pas être directeurs d’école ».

C’est ce que souligne une étude menée par le General Teaching Council for England auprès de 3665 enseignants du primaire et du secondaire. Seuls 4% ( ! ) envisagent de devenir directeur ou trice d’école dans les cinq prochaines années.

Explication parmi d’autres : la fonction enseignante s’étant très fortement féminisée, en France comme en Angleterre d’ailleurs, les femmes estiment que leur vie privée et familiale n’est pas compatible avec un poste de direction qui demande, de plus en plus, un investissement personnel trop important.

Y a donc comme un malaise, chez les Rosbifs comme chez les Froggies.

OK, Robien a fait un effort, que je juge pour ma part petit et nettement insuffisant et que lui estime, ainsi que le Syndicat Enseignant, comme un grand pas en direction des personnels de direction du Primaire.
Mais bon : faut se rendre à l’évidence. Il a fait à l’économie en tapant dans le réservoir de la formation initiale pour aider les directeurs un jour par semaine. Mieux que rien, bien sûr. Sauf que les dirlos à moins de 4 classes ont eu que dalle. Et qu’ils – elles – ont sur les épaules la gestion de toute une école.
Je parle pas de l’incidence – c’est vraiment un incident – financière qui revient à une augmentation de…15 € par mois. Avec ça, tu peux même pas te payer un abonnement de téléphone portable. Si c’est avec ce genre d’arguments qu’on pense attirer des vocations vers la direction… c’est pas la bonne direction.
Mais bon : y a plus de sous dans les caisses de l’Etat, paraît-il – en tout cas pas pour les fonctionnaires.
Je sais : on a la sécurité de l’emploi, les promotions internes par échelon et bien sûr les vacances. Ah les vacances !!!!!!!!!!!!!!
Alors ? Alors, on fait comme on a toujours fait : on fonctionne et on fait fonctionner la machine éducative, puisqu’on est…fonctionnaire. Fonctionnez, y a rien à voir !

Et puis, me direz-vous : quel est l’employé qui reçoit une gentille lettre de son patron au moment de reprendre le collier, dans laquelle on lui écrit « Je sais que cette année encore je pourrai compter sur votre dévouement ( waouh ) , vos efforts ( Gnnin ) et votre sens du service public ( méga waouh ) pour veiller à la réussite ( hip hip hip) de tous
( sans exception ) les élèves ainsi qu’au bon fonctionnement ( de l’huile pas du sable ) de l’administration scolaire. » C’est-y pas beau et encourageant, cette prose- là ?

Et je ne me lasse pas non plus de la formule de politesse finale dans laquelle Gilles de Robien soi-même m’exprime (presque en aparté et dans le creux de mon oreille si sensible ) sa gratitude et la reconnaissance de la Nation ( ah que j’aime ce grand N ) pour le travail que j’accomplis ( ou que je vais sûrement et vaillamment et gentiment et assidûment et quotidiennement accomplir).

Comme le chanteur Raphaël, mais pas pour les mêmes raisons, j’en ai les larmes aux yeux.
Mouchoir ! En papier, certes ...mais mouchoir, tout de même.


* Source : Site, très bien documenté et que je recommande : www.vousnousils.fr



14 septembre 2006

Un parmi d’autres ( e pluribus unum )




Donc c’est vendredi. Il est un peu plus de 17h45. Et tout ce que j’arrive à penser, en rassemblant quelques neurones égarés et ce qu’il me reste d’énergie est :
« Tiens ! La semaine est finie ! »
Comme si le fait d’avoir survécu à cette deuxième semaine pouvait être considéré comme un exploit ! Je ne suis sûrement ni plus ni moins bien loti que tous les instits et profs d’école disséminés ici ou là sur le territoire national – sans oublier nos DOM TOM, pour qui j’ai une pensée émue en ce moment même ; pensez : un petit bout de France si loin de la mère patrie.

Alors voilà : j’ai dû accueillir dans mes locaux – qui sont en fait ceux de la municipalité stéphanoise – les élèves de maternelle et de primaire qui n’ont pas pu prendre le repas de midi dans les locaux de la cantine ( il paraît qu’on dit maintenant « le restaurant scolaire », ooopppsss ! ) Un groupe dans la salle informatique et les autres dans la bibliothèque. Ils ont donc pique-niqué vu que la salle de cantine ressemblait plus à une pataugeoire qu’à une salle à manger et qu’il aurait fallu des bottes, un ciré et un moral solide pour y prendre une collation même légère.
Bon d’accord, il a plu pas mal toute la nuit ; ce qui arrive fréquemment en septembre, d’ailleurs. Mais il y a à tous les coups – foireux – une entreprise d’étanchéité qui a dû merder un max au niveau de la toiture pour transformer celle-ci en passoire à la moindre intempérie.
Je ne jette la pierre à personne : j’ai pour habitude de nettoyer d’abord celles, nombreuses et parfois de taille, qui sont dans mon propre jardin.

Bref. Il a fallu gérer l’urgence et l’impondérable. Une fois de plus. On l’a fait. Les gamins trouvaient ce genre de nouveauté plutôt rigolote. On a donc transformé une petite catastrophe en un moment imprévu,et presque convivial. Les gamins ont bien aimé.

Moi ? j’ai pris ce genre de péripétie avec beaucoup de philosophie et d’humour. Ce qui m’inquiète un peu, c’est que je l’ai pris également avec pas mal de fatalisme.
Serais-je timoré, désabusé, voire cynique ?

L’après-midi, après cet intermède surprenant, j’ai dû gérer de nouveau les 2 ou 3 élèves de ma classe qui, décidément, ne font vraiment rien comme les autres. Et qui, subséquemment, dérangent tous les autres qui n’ont pas forcément besoin de cette gêne-là.
J’ai géré tant bien que mal, avec beaucoup d’énergie, de concentration et pas mal de savoir-faire – sans fausse modestie. J’ai pris beaucoup sur moi. Psychologiquement, ce genre d’exercice sur corde raide permanente, ça vous travaille et ça vous use très vite ce qu’on appelle communément « les nerfs », pour faire court.

Et, à ce point de la réflexion et de réflection, je repense à toutes celles et tous ceux, débutants, qui se retrouvent en cette rentrée devant des classes de zozos de ZEP et qui se demandent bien ce qu’ils sont venus faire et comment ils vont bien pouvoir gérer « tout ça » sur une année scolaire complète.

Je ne suis pas tout à fait débutant mais je me pose le même genre de questions.
Et, franchement, je n’ai pas encore toutes les réponses. Je fais le solide, comme ça en apparence, mais ces quelques gamins me plongent dans le trouble et dans des abîmes de doute avec des questions bien épaisses du genre : est-ce qu’on va arriver à trouver un socle commun ? Est-ce qu’on va s’occuper d’abord des problèmes de comportement avant les contenus, ou l’inverse ou en même temps ? Est-ce que, certains soirs en sortant, je ne vais pas mordre un chien ? Vais-je commencer à me ronger les ongles ? Ou vais-je me teindre enfin les cheveux ?


Bref, tout ça s’agite bien dans ma p’tite troche de pédago aguerri.
Aguerri ? Tu parles !!!! Pas trop guéri avec de forts risques de rechute. Mais, chut, la représentation est déjà commencée…

13 septembre 2006

La violence du fleuve


L’ami Louis de Namur, en Belgique, m’envoie cette belle pensée ( Lanza del Vasto ou Brecht ?) :
« ON PARLE SOUVENT DE LA VIOLENCE DU FLEUVE, MAIS JAMAIS DE CELLE DES RIVES QUI L’ENSERRENT. »
Et l’ami ajoute que « celui qui a écrit cela a raison et tort à la fois. Tort car que serait le fleuve sans ses rives ? Et c’est bien la vigueur du fleuve qui a forgé ses rives, sans quoi il ne serait pas, ne serait plus. C’est bien aussi la rigueur des fleuves qui fait le fleuve en l’enserrant, le canalisant plus ou moins. »
Vous aurez compris qu’il ne s’agit point d’excuser la violence et ses conséquences. Mais bien de la décrire et surtout la comprendre. Analyser n’est pas absoudre !
Et que fait l’école, et qu’est-ce que je fais dans mon école et dans ma classe si ce n’est prendre en compte en même temps la force de tous ces mini-fleuves que sont nos élèves et les contraintes, parfois trop fortes pour eux, qui les enserrent, les brident ? Au point qu’ils emportent tout sur leur passage, y compris eux-mêmes d’ailleurs. Ils s’emportent alors dans leur rage ou leurs colères, sans toujours comprendre ce qu’ils font et ce qui leur arrive.
À nous donc de gérer à la fois le courant du fleuve et la contrainte des rives. Des rives qui enferment, mais qui sont aussi repères. Sans oublier le chemin du fleuve, son parcours, sa direction.
L’école est bien aussi le lieu permanent de cette dialectique : contraindre tout en laissant couler, apaiser sans enlever trop de force au courant vital. Loin du marécage et de ses eaux stagnantes et putrides. Loin des crues dévastatrices qui emportent tout sur leur passage et oublient jusqu’aux rives qui étaient censées les borner et les contenir.
Pour l’instant, en ce début d’année ardu, mes élèves sont plus torrents de montagne à peine sortis de la moraine glaciaire. De les voir ainsi me rappelle de belles images de Vanoise et de superbes randonnées que je fis dans ces contrées superbes. Ce souvenir et cette vision apaisent mon esprit et modèrent mon inquiétude.
La randonnée peut alors commencer.

12 septembre 2006

Co éduquer ?

Réunion de classe avec les parents. 5 sur 13 se sont déplacés. Certes, ça ne fait pas lourd. On se dit que ce n’est déjà pas si mal…On se console comme on peut. Avec mon collègue du lundi, on leur a présenté dans les grandes lignes ce qu’on allait faire cette année et comment on allait s’organiser.
J’ai surtout insisté sur ce bilan hebdomadaire qui leur sera transmis en fin de semaine. Bilan qui leur donnera un aperçu du travail fait par leur enfant et de son comportement. J’ai bien sûr beaucoup insisté sur ce dernier point vu l’état d’agitation des troupes.
On a parlé de co-éducation : le système ne peut fonctionner que si les trois parties – l’élève, l’école et les parents – marchent ensemble et dans le même sens. Ils sont tous bien d’accord sur le principe. Sauf ceux qui ne se sont pas déplacés à la réunion…Mais bon, faut bien des principes et des règles, même pour les absents. On met en place un système, un modus vivendi plutôt, sans lequel rien de constructif ne peut se faire.
Car il s’agit bien de cela : construire et se construire. Pas sur du sable et encore moins dans la tempête. Beaucoup de ces loupiots sont tellement instables que le moindre édifice n’a aucune chance de tenir bien longtemps.
On va donc voir, et tester, si ce fameux « triangle pédagogique » - élève école parents – va tenir le coup à l’épreuve de la vie…et de la classe. Pour sa part, l’institution école n’a pas bien le choix : elle est là pour ça et on doit mettre en œuvre tous les moyens pour que ça marche.
Quant à la réussite pour tous sans exception qui est brandie comme un étendard, c’est autre chose. On va déjà voir comment on peut vivre et travailler ensemble sans que ça soit forcément désagréable pour les uns et pour les autres. Déjà pas si mal. Petits projets à court terme, sur la journée ou sur la semaine pour certains. Un petit pas puis un autre. Chacun à son rythme.
Une chose est sûre, personne ne va s’ennuyer. Peut-être même que certains y trouveront du plaisir. Chiche ?



11 septembre 2006

Sur le carreau

Sur le carreau

Voilà voilà. Après toutes ces années pendant lesquelles nous n’avons eu aucun problème de dégradations, c’est le troisième caillassage sur l’école maternelle. Pas un acte délibéré. C’est encore plus idiot que ça : à tous les coups – sic - des gamins qui traînent dans le quartier tout le week-end, long à mourir pour eux, et qui prennent pour cible, par désoeuvrement et par connerie aussi, les vitres qui ont eu le malheur de leur faire un clin d’œil.
On se voit avec la directrice de la maternelle. On mesure la gravité du truc. Faut faire quelque chose, c’est sûr. On décide en commun d’écrire ce texte et de le distribuer aux parents des deux écoles. Pour ma part, je le donnerai aux CM1 et CM2, de la main à la main, avec une petite explication du pourquoi et du comment.

« A TOUS LES PARENTS DE L’ECOLE MATERNELLE ET DE L’ECOLE PRIMAIRE MONTCHOVET »

« Ce week-end, des pierres ont été lancées contre l’école maternelle. C’est la 3e fois depuis cet été. Cet été, des vitres ont été cassées aussi à l’école primaire.
A cause de ça, les élèves de Petite Section ont été privés d’école aujourd’hui. De plus, comme des panneaux de bois ont été mis à la place des vitres, les petits ne voient plus la lumière du jour quand ils sont dans leur école.
Parents, cette école est l’école du quartier. Elle appartient à tout le monde. Tout le monde en est responsable. C’est un endroit très important pour vos enfants et pour la vie du quartier.
Les enseignants et tout le personnel font le maximum pour que vos enfants apprennent dans de bonnes conditions. Ils ne peuvent accepter de travailler dans un lieu abîmé et vandalisé. C’est INACCEPTABLE aussi bien pour eux que pour les élèves. C’est INACCEPTABLE pour tout le quartier. C’est aussi un problème de sécurité et de dignité.
Il n’est pas normal que de telles choses se soient produites sans que personne n’ait réagi ou ne l’ait signalé. C’est aussi notre devoir et notre responsabilité, en tant que parents ou en tant qu’adultes, de faire le nécessaire pour que de tels actes soient arrêtés et ne se reproduisent plus.

10 septembre 2006

Echec et désarroi

Je parle à quelques collègues de l’interview toute fraîche d’un prof d’école tout frais émoulu – et vite moulu – qui a démissionné, complètement écoeuré, au bout d’un an de galère. Son bouquin s’appelle : « Les désarrois d’un instituteur. » Pas moins.
On peut comprendre aisément certaines des raisons qui l’ont amené à quitter la maison Education. Tout le monde reconnaît que l’IUFM ne forme pas assez les futurs enseignants à affronter – gérer ? – un groupe classe sur le plan relationnel.*
Formation trop théorique, sûrement. Ce que confirme un de nos tout jeune collègue – donc frais émoulu pas moulu – qui est remplaçant – BAZIL dans le jargon.
On peut juste remarquer au passage que les médias, une fois de plus, font leurs choux bien gras des propos de tous ceux qui dénoncent le système et ses travers. « Alors, racontez nous comment c’est nul, l’Education Nationale. Et surtout n’hésitez pas à nous illustrer vos propos avec quelques anecdotes bien croustillantes. »
Bon, OK, tout n’est pas si bien que ça dans le mammouth. Mais il ne fabrique pas que des crétins, n’est-ce pas, M. Brighelli ?
Imaginez une interview normale d’un pédago de base normal qui expliquerait que
« bon c’est pas fastoche tout le temps mais on y arrive. Et les élèves repartent avec un bagage et des connaissances. On leur apprend même à lire ou à compter pour certains. Si si, je vous assure. Ils ne sortent pas tous illettrés ou analphabètes. Pas tous. Et même qu’il y a des pédagos qui y prennent du plaisir et qui démarrent l’année avec entrain – même de banlieue. Un nouveau challenge avec de nouvelles têtes. »

Mais ça, ça va intéresser qui ? Quelle télé ou quelle radio ? Aucune chance de faire grimper l’audience avec ça. Alors que si tu démolis à mort et que tu fais dans le bien saignant…voire l'anecdotique...
Moi, par exemple – au hasard – peu de chance qu’on me tende un micro. J’ai 53 balais, c’est ma énième rentrée et j’aime toujours autant ça. Maso, je dois être.
D’autant plus que je vais avoir des schtroumpfs pas évidents évidents du tout à gérer, je le sais déjà ; ça sert aussi à ça, les réunions de cycles, dans lesquelles on ne parle pas que de vélo mais aussi des élèves et de leur parcours et des difficultés de certains ; dont les miens ont fait partie.
Mais bon, ça fait un challenge de plus. Une chose est sûre : je vais pas m’ennuyer. Mais comment peut-on s'ennuyer, d'ailleurs, dans ce boulot ?

* 75 % des enseignants jugent "insuffisante" voire " très insuffisante" leur formation en IUFM d'après une enquête de la DEP ( Direction de l'Evaluation et de la Prospective).
Entre autres, ces enseignants demandent " des réponses sur la gestion du quotidien ainsi qu'une praxis efficace et mobilisable immédiatement " ( c'est à dire des recettes simples et efficaces, au moins au début )

09 septembre 2006

Ombre et lumière

Deux matins où ça s’est plutôt bien passé. Il faut dire que j’avais bien bétonné avec des exercices, des fiches, des tests. Tout un attirail minutieusement préparé sans aucun temps mort. Ça a marché. Avec ces gamins-là, c’est dingue : tant qu’ils sont dans le faire, sous la pression, ça marche. Tant qu’ils pédalent, le nez dans le guidon, ça roule.
À condition d’être là, devant eux, à côté d’eux, derrière eux. Pour eux. Les stimuler, les encourager, les soutenir. Les pousser dans les côtes. Leur donner des conseils. Sans cesse. Les freiner dans les descentes, qu’ils dévaleraient bien à fond, au risque de tout péter. Et puis corriger, remédier, relancer, expliquer, reprendre, re-expliquer, reformuler. Et de la patience, de la patience, et encore de la patience.
Et puis, surtout, animer, bouger, se démener. Être en représentation non stop. The show must go on. 8h30 à 10h00. Puis court entr'acte de la récré. Deuxième acte jusqu’à 11h30. Court repas, sur place. Boulot de dirlo oblige. Récupération en calories ; et mentale. Plus ou moins. Troisième acte de 13H30 à 15H00. Bien plus chaud l’après-midi. Petit entr’acte, tout de même. Quatrième acte, le plus physique, à tous points de vue, jusqu’à 16h30.
Le rideau se baisse. Pas d’applaudissements. N’est-ce pas, Gad ? Juste le grand silence. D’un coup. Qui te tombe dessus. Le spectacle est fini. J’ai été comment ? Moyen ? Bon ? Mauvais ?
Et eux ? Ils ont bien joué tous les rôles que j’avais prévus ? Moyens ? Bons ? Mauvais pour certains ? Ah bon.
Le plus dur, dans ce genre de spectacle, c’est que tu es à la fois le scénariste, le comédien et le metteur en scène. Et, comme au théâtre, on ne te pardonne rien.
Vraiment rien. Pas droit à plusieurs prises. Et pas de trucages, surtout.
Eh, mec, la péda, c’est pas du cinéma !!!

08 septembre 2006

Un son qui cloche

Mais pourquoi ça a cloché ? J’avais tout bien préparé. Ça aurait dû marcher. Ça n’a pas.
Groooosssses tensions jeudi après-midi. Temps lourd et orageux. Orage, un vrai, qui éclate d’ailleurs en début d’après-midi après cette forte voire étouffante chaleur de la semaine.
Orageux dans la classe idem : noirs nuages d’instabilité et d’excitation incontrôlée… et incontrôlable. Fous rires, cris divers. Et le reste à l’avenant, mon Fernand.
Plus une classe. Un poulailler. Une mini jungle. Un zoo ? Un vaisseau pris de folie où tout tangue, tout roule, y compris le capitaine. Pourtant aguerri, lui qui se croyait vieux loup
de mer qui en a essuyées, des tempêtes. Mais va essuyer celle-là …
Fin de navigation et d’après-midi, donc, dans un inconfort total, secoués ballottés de toutes parts.
Nouveau coup de tabac le vendredi après-midi. Mais après 15h . Moins violent et surtout moins long. J’aurais dû faire ce que j’avais prévu : du sport ou des jeux. J’ai voulu tenter, trop consciencieux et nettement téméraire, l’échange d’albums et la lecture offerte. Un bide total. Erreur de débutant. Ou excès de confiance. Bien fait pour moi. Plus, cerise sur le crumble, un élève, déjà naturellement très perturbé – un euphémisme – qui pète un câble total à 16h10 avec crise aigüe à se rouler par terre et à hurler. J’ai géré tant bien que mal. Plutôt mal que bien. S’est calmé à peu près au bout d’un quart d’heure. C’est long, un quart d’heure, avec toute la classe qui est là.
Parents de l’agité joints par téléphone dès la fin de la classe. Leur expliquer. Prendre rendez-vous avec eux pour une entrevue urgente dès ce lundi. Sont d’accord pour venir.
Le soir même, mes parents à moi, toujours alertes à 80 ans : « Alors, cette rentrée ? Bien passée ? »
Comment, mais comment leur expliquer, avec des mots simples, le contexte, la classe, le quartier, les gamins ? Au risque de les inquiéter, les déstabiliser. Leur avouer, l’air sinistre : »Depuis le temps que je fais ce boulot, c’est la pire rentrée que j’ai faite » ???
Faire cas de rien, comme on dit de par chez nous. « La rentrée ? Oh, vous savez, depuis le temps que je fais ça, c’est la routine ! »

07 septembre 2006

KO après le chaos


Il est 16h45. Je suis assis, là. KO. Donc, bien assis. Ils m’ont littéralement vidé. Ils : ce sont bien sûr les 12 zèbres qui m’ont été confiés cette année.

Le matin, on a pu avancer, cahin-caha. Poésie, grammaire puis manip de dizaines en maths. Pas toujours évident mais dans l’ensemble, et à l’aide de toute mon expérience, on y est arrivé…
Cet après-midi, ce fut… un cauchemar éveillé. Quoi que je fasse ou que j’essaie de faire, au fur et à mesure que l’après-midi avançait, ils ont sombré dans le n’importe quoi. On n’a donc pratiquement rien fait de très concret cet A.M. !
Je n’ai pas élevé la voix. Pourtant, il y avait matière à ! Je n’ai puni personne. C’est ce que certains attendaient, d’ailleurs. Pourquoi tu punis pas ceux qui font n’importe quoi ? J’ai mesuré les dégâts avec eux. On a reparlé des règles de vie, bien sûr. On a essayé de faire en sorte que ce soit le moins désagréable moins possible et qu’on tire, au moins, quelque chose de ce magma informe et étrange qu’était la « classe » cet après-midi. Les guillemets sont bien là pour montrer qu’il s’agissait plutôt d’un groupe, plus ou moins éclaté, disparate, désordonné mais pas une « classe » dans le sens où on l’entend habituellement.
On a eu une vraie accalmie à… 16h00. Avant, ce fut lent, difficile, houleux, tempêtueux. Dur à vivre autant pour eux que pour moi. Mais il fallait aller au bour de leur démesure, de leur instabilité. Pour en parler après.
On a réussi à faire un premier point à 16h00, donc. Ils ont pu enfin s’écouter et m’écouter. Ce furent quelques minutes fugitives et passagères, très fragiles. Mais bien là.
A 16h20 – il était temps – j’ai pu leur lire un album. Qu’ils ont enfin écouté, regardé et apprécié.
Ils sont partis à 16h30, sans s’apostropher ni se bousculer. Plusieurs m’ont lancé en partant : « A demain, maître ! »
Je ne sais si c’est cet « à demain » qui m’a achevé ou cet après-midi d’enfer qu’on a passé ensemble. Et qui me fait m’asseoir aussi vide qu’un sac en papier.

05 septembre 2006

Si la bique

Notre cher ministre a encore frappé sur les antennes radio. Il repique au truc avec une très forte insistance : d’abord les lettres, puis les syllabes et enfin les mots pour apprendre à lire. Combinatoire et syllabique. Rien d’autre.
Si c’est le ministre de l’Education soi-même qui le dit…tout est dit. Y a plus qu’à obtempérer ; et syllabiquer.
Va resurgir l’éternel débat sur les méthodes de lecture. Le sens ou le son ? Le sens d’abord et le son après ? Ou le son synchro. Méthode manuelle ou manuel de lecture ? Va te faire fiche. Mais quelles fiches ?
Pas difficile, pourtant : P et A ça fait PA. Ah bon, ça fait pas ? Mais non. Mais si.
Ah ? ça fait SI, alors ? Mais non ! Et T et I, ça fait bien TI, alors ? Bravo, tu as compris . Eh, attention ! dans ATTENTION, pourquoi ça fait pas TI ? Mouais, attends, je vais t’expliquer, c’est pas si simple, la combinatoire. Ça se combine pas toujours comme on voudrait. Voilà, des fois ça fait TI des fois ça fait SI.
Faut voir. Faut entendre aussi. Alors, il faut bien voir pour bien s’entendre et se comprendre ? C’est à peu près ça. Après, c’est du cas par cas. Ah bon, avec le K ça marche aussi ? Et avec le chat ? CH et A, rassure moi, ça fait bien CHA.
Oui oui, ch’est cha ! Ouf, j’ai eu peur pour cette pauvre bête. CH et O, on boit le CHOCOLAT. Là, ça va. Et si on le boit CHAUD ? Pourquoi y a un A et puis un U ?
Ca fait CHAHUT, alors, dis-moi. Et si on s’y met tous en CHŒUR, on n’entend plus le CH, alors. Silence, taisez-vous, bandes d’ignames…euh, d’ignares. Je sais plus ce que je raconte, moi. Bon : z’avez qu’à lire la lire la circulaire. Circulez, y a rien à voir. Juste à appliquer les instructions. Officielles.

Ouf ! On respire. Parce que là, pour le coup, c’est clair, les programmes : très précis, rédigés pour chaque cycle et chaque matière.
Le même ministre le martèle même sur les mêmes antennes radio : il y a les programmes, il faut les appliquer. Re ouf ! Comme si on avait fait autre chose toutes ces années. Comme si les auteurs et éditeurs de manuels, trop restés au soleil des vacances, allaient proposer d’étudier le krach de 1929 au CE1 ou l’extraction des racines carrées en cycle 3.
Mais bon : question déclarations inopinées et/ou interpellations de ministres, on est vaccinés à l’Education Nationale. On a eu notre lot de grandes intentions louables, de petites phrases assassines, de déclarations grandchamboulesques, d’on va voir ce qu’on va voir, et les reste à l’avenant.
Leur en vouloir, à nos éminentes éminences ? Chacun son job. Nous au banc des rameurs, touuuuuut en bas. Tacherons tachant de s’attacher à faire avancer le navire. Et y a pas que des galères dans l’immense océan éducationnel. Y a vraiment de tout comme embarcations. Idem pour les équipages. Et y a des croisières, des navigations hauturières, du grand large, des rugissants et des hurlants, des pacifiques et des plus agités. Y a vraiment de tout. Y a aussi des hourras et des ouille ouille ouille, des souquez ferme et des jetez l’encre ; des faut écoper et des étarquez sec ; des pots au noir et des encalminages, des force 8 et de petites brises sympas. Y a vraiment vraiment de tout.
Pas leur en vouloir, donc. Eux derrière un micro tendu fébrile ou une caméra bien attentionnée, déclinant LEUR vision essentielle, LA LEUR toute personnelle et rien qu’à eux, de la « Mission d’Education. » Si on tend bien l’oreille, on peut même entendre le M et le E majuscules. Même si, parfois, mais pas toujours il est vrai, les moyens sont minuscules…par rapport à la Mission, justement, à mener à bien. Avec obligation pour toutes et pour tous de réussir. Banni le mot échec. Rayé. Puni cagibi au piquet. Vous me direz : tant mieux. Réussite pour tous à tous les étages du système. Interdit d’échouer, j’ai dit, strictement impensable. On s’en porte garant. Auprès des parents. Le beau serment. Le beau credo. Un sacré cadeau. Un devoir sacré. Noble et généreux. L’annoncer, ça en jette.
Oh les équipages, les armateurs, les capitaines et tout le toutim, va falloir assurer ! La croisière ne s’amuse plus. Ordres de l’amiral en chef. On va tout fait tout Robien, tout bien tout net. On était Allègre – sans plus – puis on a pris le Ferry – drôle de traversée. On a pratiqué le Lang de bois. On est habitués. Amarinés, on dit en beau langage nautique.
Allez ; hisse et haut ! Nouvelle rentrée, traversée nouvelle. On va essayer. Comme on a fait avant, remarquez. J’avais pas eu la sensation de baguenauder toutes ces années. Pas mal de coups de rame, de voiles hissées, de miles nautiques accumulés et de maillots mouillés.
Bon vent !

04 septembre 2006

Top départ


La vraie rentrée pour tous : écoles, collèges et lycées. Plus de 12 millions d’élèves dont plus de la moitié pour les seules écoles maternelles et primaires.
Ca fait tout de même 56 158 écoles. Dont la nôtre, petit école de quartier avec ses 5 classes, ses deux CLIS et ses 90 élèves. Petit îlot dans l’immensité de l’archipel.
Le ministre, le nôtre, Gilles de Robien, parle à la radio, argumente, débat. Ce qu’il dit tient plutôt bien la route.
Reste à l’appliquer en musique. Sébastien, mon remplaçant du lundi, a pu mesurer aujourd’hui même la difficulté de ce qui l’attend, de ce qui nous attend. Un faible effectif, certes, mais sur les 12 élèves, il a pu constater, de visu, et de très visu même, que seulement 3 élèves devraient mériter l’appellation « d’élève ». Les 9 autres ont de tels troubles et problèmes, à des degrés divers, qu’il a dû interrompre plusieurs fois les leçons pour rétablir un semblant de calme.
Je l’avais prévenu et je m’y attendais plus ou moins. Lui est sidéré, au sens fort du mot. Nous passons une bonne heure après la classe dans une intense séance de « débriefing » au cours de laquelle nous faisons le tour de ce qui n’a pas fonctionné. Je lui explique ce que je vais faire pendant les trois jours où j’aurai la classe.
Malgré toute mon expérience, je n’en mène pas trop large : je sais, par expérience justement, qu’il va me falloir utiliser tout ce que j’ai appris au cours de toutes ces années pour qu’on arrive ensemble à faire quelque chose qui ressemble à une classe. On va tout de même passer 10 mois ensemble. Une telle durée, à raison de 7 heures journalières, ce n’est pas rien. Pour que tous acquièrent ce fameux « socle commun » sans lequel rien ne peut vraiment se construire, il va falloir des kilos de patience et d’attention, des quintaux d’obstination et de persévérance, et surtout des tonnes d’observation et d’analyse. Le tout en étant ferme mais pas rigide, souple mais pas laxiste, autoritaire mais pas dictateur, sérieux mais pas rébarbatif ; avec parfois un peu d’humour, mais à petites doses et au bon moment ; avec suffisamment de recul pour ne pas trop se prendre la tête mais tout en restant impliqué devant l’importance de la tâche et des enjeux.
Un challenge, un pari. Comme à toutes les rentrées, d’ailleurs. Cette année-là, ça risque d’être
« un peu plus chaud ». A la fois passionnant et un peu effrayant. C’est parti !!!!!!!

01 septembre 2006

Brou ha ha.



Aujourd’hui, on a manipulé la langue française. On a commencé à aborder les notions de singulier et de pluriel. Avec de petites étiquettes à découper, à classer. Avec des bulles et des flèches, aussi. La grammaire, c’est de la mécanique : il faut démonter, bricoler, remonter, voir comment ça fait, recommencer. Apparemment, ça a bien plu, ils ont tous bien marché.
Cette façon de prendre la langue, de la décortiquer, met tout de suite les gamins en activité. Très « kynésique » tout ça, comme disent les spécialistes. Après tout, le français n’est pas encore une langue morte. Autant la faire bouger un max, non ?
Idem pour les maths. On s’est coltiné avec des dizaines. Tout cela dégageait un joyeux et sympathique brouhaha. Il y a du rire dans ce mot là. De la joie et du plaisir. Pas le genre charivari ou tohu-bohu. Plutôt ce doux ronron que j’aime bien de ruche qui bourdonne. Quel miel feront-ils de tout ceci ?
Cet après-midi, on est entré direct dans l’activité sciences en sacrifiant des melons et des pommes.Certes, on eu des pépins, mais sans gravité. On les a même mis dans des pots avec du coton humide. On a commencé à dessiner nos observations et nos expérimentations dans un cahier d’expériences. Là encore, tous ont bien participé. Ca m’a rappelé les fameuses « leçons de choses » que ja faisais, alors élève, dans les années soixante…au siècle dernier. Des points communs, bien sûr, mais en nettement plus actif et expérimental.
J’espère être à la hauteur de leurs envies et de leur « insatiable curiosité ».
Quant au contenu scientifique, il sera… ce qu’il sera. Après tout, la démarche est bien aussi essentielle, sinon plus, que le résultat qu’on cherche ! Non ?
Et puis, un chercheur est-il encore un chercheur lorsqu’il a enfin trouvé ? On va donc essayer, découper, bricoler, bidouiller, tordre, démonter, remonter, découper, triturer, transvaser, verser, coller, visser, ajuster, cueillir, planter, creuser, scier, clouer. La liste des verbes d’action est non close.
Une chose est sûre : on n e va pas s’ennuyer.

29 août 2006

Le trac, toujours

Mardi 29 août Rien à faire. Même après toutes ces années, la rentrée, c’est toujours le trac. Même à l’aube de la 33e. Réveil à 2h du mat’, puis toutes les demi-heures. Finalement, je me lève à 5h11 après être resté stupidement les yeux comme un hibou depuis 4h30. Le trac parce que ce sont de nouveaux élèves : nouvelles têtes, nouveaux défis. Et des questions stupides : est-ce que je sais encore faire ? Est-ce je vais être toujours à la hauteur ? Est-ce que je vais avoir envie tout le temps ? J’ai beau me dire toutes ces banalités pour me rassurer : que je ne suis tout de même pas un sortant de l’IUFM, que c’est ma treizième rentré ici, que je connais tous les collègues et la plupart des élèves… Rien n’y fait. L’angoisse est bien là, sournoise, déstabilisante. Faire confiance aux automatismes, à l’expérience. Rédiger son cahier journal. Prévoir par écrit l’emploi du temps de toute la journée. Préparer quelques fiches. Ca rassure. Ca construit le cadre. 6h30. Ca va déjà mieux. Ca va marcher. Il n’y a pas de raison. On va tout de même passer 10 mois ensemble. Ce n’est pas rien. Aussi bien pour eux que pour moi.